MISSING (ZEVALASSAN) [FB]

Retour de mission dans les Tréfonds, retour à la surface et un air bien plus sain, ce n'est pas Sarren qui va s'en plaindre. C'est étouffant à force, sans compter la compagnie des engeances qui n'est pas des plus agréables ; sur ce point beaucoup de ses camarades sont parfaitement d'accord. C'est le lot des Gardes, malheureusement, et l'elfe préfère ce genre de tâches en comparaison de celles qui lui étaient affublées dans son clan, avant, même si ce n'est pas pareil. Rien n'est identique. Parfois quelques remords surgissent, des faciès familiers comme celui de Fenara mais son nouveau devoir lui permet d'avoir l'esprit occupé. Il aide à la sauvegarde de Thédas, ainsi, en combattant ces créatures et ça lui donnerait presque l'impression qu'il n'est pas aussi lâche. Et puis c'est une bonne couverture, une bonne protection. Il n'est jamais seul en mission, toujours accompagné d'au moins un ou deux camarades comme actuellement. Tous les trois pénètrent les grandes portes de Fort Bastel d'un air éreinté, une envie pressante de se mettre à l'aise les accaparant. Sarren aussi est pressé mais c'est à son tour de se rendre dans le bureau du Garde-Commandeur faire un rapport. En chemin le peu de personnes qu'il croise ne lui soufflent mot et à l'arrivée, il constate que la pièce est vide. « Bon, visiblement il n'est pas là. » Il grimace légèrement, sort du bureau, cherche une présence qui pourrait lui en dire plus. C'est bien le moment pour que les couloirs soient aussi vides, comme si tous ses frères et sœurs étaient partis combattre l'enclin ; qui n'est pas encore installé malgré les rumeurs. Bon. L'elfe n'a pas trente-six milles solutions, il demande à la première personne sur laquelle il tombe et qui... n'en sait rien. Tant pis, il passe à la deuxième après avoir arpenté un autre couloir à vitesse grand v, c'est qu'il est pressé de se détendre. Toujours rien. Après quinze bonne minutes à tourner en rond sans un Garde qui est fichu de lui dire où se trouve Law - excepté qu'il est sûrement en train de roupiller dans un coin incongru du Fort mais qui sait où, il tente une dernière fois sa chance avec un brun. Sans vraiment faire attention de qui il s'agit, recrue ou non. « Eh, dis-moi, tu sais où se trouve le Garde-Commandeur ? J'ai un rapport à lui faire mais il est introuvable. Il paraît qu'il est en train de roupiller dans un coin du Fort, je ne sais-où, ce que j'aimerais bien faire aussi à vrai dire, je suis éreinté de ce retour de mission. »

Quand on est une simple recrue, on a tôt fait de vous confondre avec un larbin. Zevy en avait assez vu dans sa vie pour exiger d'être traité avec un peu plus de déférence, mais il était aussi assez mal placé pour l'ouvrir. Ça ne lui aurait rien apporté d'être si frontal, alors il ravalait sa rage, et souriait. La subtilité n'était pas juste une manière d'être pour Zevalassan, mais un véritable moyen de tirer son épingle du jeu. Il fallait au moins ça pour réussir à vivre au milieu des shems et de leur crasse.

Il était en train de s'occuper de ranger les armes d'entraînement et repassait dans la cour, les bras vides, quand on l'interrompit. Enfin, 'on', un charmant jeune elfe. L'air affable de Zevy n'était cette fois pas forcé ou contraint.

— Je n'ai aucune idée de où il peut être, mais s'il roupille, tu ne peux pas en profiter pour te reposer, toi aussi ?

Ce n'était normalement pas le protocole, mais le protocole pouvait bien aller se faire voir, surtout quand il s'agissait une énième fois d'un cas d'exploitation elfique manifeste. Attendre n'allait pas tuer ces saletés de shems, si ?

— Enfin. Je suppose qu'on peut tenter les baraquements ?

Abandonnant sa mission de rangement (sérieusement, n'importe qui pouvait s'en occuper, alors pourquoi lui ? parce que c'était un elfe, c'est ça ?), Zevalassan guida Sarren jusqu'aux dortoirs du Fort, mais là encore, aucune trace de Law.

— Bon. Au moins on a trouvé des lits. Repose-toi, ou alors écris ton rapport et je le présenterais pour toi. On peut bien s'entraider, entre elfes, non ?

Avec un grand sourire sincère, Zevy poussa presque Sarren dans un des lits. Il fallait bien que quelqu'un prenne soin de ce pauvre petit choupinou aux oreilles si délicieusement pointues !

Ah, quel plaisir de découvrir l'un de ses semblables elfes, ne le dépassant guère en taille, ce qui lui change ; faute de son complexe. Il réalise bien vite qu'il s'agit là d'une recrue, en pleine... corvée, et malgré la déception de ne pas avoir plus d'informations, celui-ci marque un point. Sarren laisse apparaître un petit sourire même s'il connaît ses obligations parfois ingrates. Au moins n'est-il pas le seul dans cette situation, néanmoins il n'est plus recrue, lui, et parfois certains l'oublient, que ce soit en raison de ses oreilles ou non. Contrairement à beaucoup d'autres elfes, il n'a aucun mépris ni différend envers les shems, sa paranoïa est de ce fait mise de côté malgré certaines situations évidentes, il n'est pas idiot. Peut-être celle-ci en fait elle partie ou est-ce dû à sa nature, à vouloir rendre service à ses frères d'armes qui sont très probablement attablés dans la pièce commune autour d'une bonne boisson. Il chasse la vision de son esprit, constatant que son interlocuteur est disposé à l'aider dans ses recherches. « Essayons, oui. Merci pour ton aide, tu es le premier qui me propose de m'accompagner. » D'un autre côté ce n'est pas étonnant, l'échappatoire est belle et plus agréable que de rester ici à ranger mais Sarren aurait sûrement eu la même réaction si les rôles avaient été inversés. Il lui emboîte le pas quand bien même il connaît la direction des dortoirs du Fort et il espère en chemin que Law s'y trouvera.

Et... non, vraisemblablement, il n'est pas là non plus. L'elfe lâche un soupire distinct qui témoigne de sa fatigue. Heureusement la proposition qui suit, provenant de la recrue, lui redonne un souffle de vie et rien que son regard témoigne déjà de sa gratitude. « Tu es sûr ? J'ai vu que tu étais en plein rangement, juste avant. » Mais il est presque poussé vers l'un des lits et se laisse finalement aller dessus, un sourire redorant son visage quand il sent le matelas sous son dos. Un autre soupire, plus de contentement cette fois, s'échappe. « Merci, mais dans ce cas, que je ne sois pas le seul à prendre du repos. » Sarren se relève à peine, juste assez pour que de sa paume il agrippe le poignet le plus proche de l'autre elfe en l'invitant à s'allonger à son tour dans l'un des lits. Après tout personne n'est là et tous deux méritent un peu de repos avant de reprendre leurs activités ingrates. « Quel est ton nom ? Le mien est Sarren. » Qu'il connaisse au moins le nom de son futur frère de la Garde, il espère que celui-ci survivra à l'Union, car déjà il s'entend très bien avec lui, et ce naturellement. Mais si leurs premiers échanges risquent d'être plutôt brefs pour l'instant, l'envie de clore ses paupières étant présente, celle de lui offrir à son tour un coup de main dans ses corvées le prend tout autant ; quand il aura pu se reposer.

Ainsi Zevalassan était le premier à proposer son aide à ce pauvre elfe ? Sérieusement ? C'était pire que ce qu'il pensait, même au sein de la Garde des Ombres. Une vague de rage le fit frissonner, avant de se tourner de nouveau vers le bel elfe épuisé devant lui.

— Ne me remercie pas, c'est normal. Enfin, ça devrait l'être.

Force était de constater que la différence d'oreilles avait toujours pour conséquence la différence de traitement, quand bien même ils faisaient partie des derniers défenseurs de Thédas contre l'Enclin et les engeances. Le respect, tout ça... Fantaisies, n'est-ce pas ?

Ils se dirigèrent vers le Fort en espérant y trouver le chef, mais ce ne fut pas le cas : Zevy proposa alors naturellement d'accomplir la mission de l'elfe à sa place, ce qu'il refusa poliment. Autant qu'ils soient deux à se reposer, disait-il. Avait-il vu que Zevalassan lui-même commençait à se sentir fourbi par les corvées ? Ou n'était-ce là que de la politesse ? Ou bien... Peut-être y avait-il un sous-entendu derrière tout ça. Joueur, Zevy sourit et se laissa agripper avant d'aller s'allonger dans un des lits lui aussi.

— Tu as raison, puisque personne n'est là de toute façon...

Il sourit et laissa Sarren se présenter. C'était un joli nom, mais peut-être pas autant que le sien. Oui, Zev était très fier du prénom qu'il s'était lui-même donné.

— Zevalassan. Mais tu peux m'appeler Zev ou Zevy, comme tu veux. Ça fait longtemps que tu es dans la Garde ?

Ils pouvaient bien discuter, non ? À moins que Sarren ne veuille directement lui sauter dessus, bien sûr.

Le sourire de Sarren s'intensifie quand son compagnon elfe se laisse finalement aller à son tour contre l'un des lits à côté de lui, après tout les deux ne sont pas en urgence. Que ce soit pour la corvée de ménage ou même le rapport qui en est un de routine, tout simplement ; rien d'anormal à signaler. En revanche malgré sa fatigue il ne tombe pas immédiatement dans le sommeil, s'intéressant à son acolyte. Les présentations d'abord puis les bases, c'est une bonne occasion de faire connaissance même si ce Zevy n'a pas encore passé son Union. Et il espère qu'il en sortira indemne ; ce n'est jamais agréable de perdre des recrues qui avaient pourtant l'air d'avoir un fort potentiel.

« Oui, on peut dire ça, je suis là depuis cinq mois, et toi ? Peu de temps j'imagine ? » Evidemment Sarren ne s'attend pas à ce qu'il lui rétorque qu'il est là depuis plus d'un mois, il doit être tout nouveau, pour cause il ne se rappelle pas l'avoir déjà vu auparavant. Confortablement installé il s'étale de tout son long sur le matelas et s'étire même à la manière d'un félin, son regard un peu perdu dans le vide se reposant sur lui juste après, sans perdre un instant. Il n'a aucune idée derrière la tête malgré sa proposition et ce qu'on pourrait imaginer. Même si l'elfe est mignon, son intérêt est plus de faire connaissance ainsi que de prendre du repos.

« Tu sais, Zev, si tu veux après notre petite sieste et quand j'aurais rendu mon rapport, je pourrais venir te donner un coup de main. Je ne vais pas avoir grand chose à faire, même si il y a les entraînements, je ne vais pas repartir aussi tôt en mission. » C'est certain qu'il ne va pas reprendre la route le lendemain à l'aube. Ce sont les Gardes Seniors qui sont affublés de plus de responsabilités alors qu'il n'est qu'un simple, un junior pourrait-on dire, ce qui ne le dérange pas tant. Tandis que ses pairs au même niveau en profitent pour se détendre, lui n'est pas contre aider cette recrue à prendre ses repaires ; lui aussi est passé par là. Ce n'est même pas de la politesse, enfin si, mais pas que, c'est de bonne volonté. Et si Sarren est conscient que certains doivent s'endurcir avec les corvées, parfois, c'est trop. De surcroît son semblable lui donne l'impression d'être quelqu'un de vraiment bien.