ROUE DU RP (LIVIA & POPPAEA)

Son mariage était peut-être un arrangement qui - justement - arrangeait les deux partis plus qu'autre chose, mais Poppée le voyait tout de même comme un mariage heureux. Une union entre deux familles qui s'appréciaient, et deux individus qui se portaient une affection toute particulière, et toute différente de l'amour conjugale. Un mariage d'amitié, c'était une chose qu'on ne croisait pas souvent dans les romans, mais cela plaisait énormément à la jeune Metellus, future Tenera qui, si un jour elle en prenait le temps, écrirait peut-être quelque chose dans ce goût-là. Mais pas aujourd'hui parce que, ce jour-là précisément, Livia était venue la kidnapper pour une sortie shopping entre filles, dans les meilleures boutique de Qarinus. L'animal sociale qu'était Poppaea était plus qu'enchantée par cette surprise qui lui permettrait, en plus, d'apprendre à mieux connaître la Tilani ; son mari étant l'un des plus proches amis de Caelestis, pour ne pas dire le plus proche, elle n'avait aucun doute sur le fait qu'elles seraient amenées à se voir de plus en plus souvent. Un autre énorme avantage à aller acheter des robes avec Livia : elle avait l'œil. Pas pour les bons prix, les réductions ou les soldes, non... Elle avait l'œil pour les belles choses, elle pouvait confirmer ou infirmer les doutes de Poppée sur telle ou telle robe, bijoux, chemise, pantalon. Mais surtout sur les robes, elle devait bien l'avouer, car même si elle appréciait les vêtements dit "masculins", ce n'était pas spécialement ce qui l'intéressait aujourd'hui. Et, d'ailleurs, elle comptait sur la jeune femme aux conseils avisés pour l'aider à choisir une robe de mariage le moment venu.

Elles avaient déjà effectué plusieurs achats (et était particulièrement contente de la robe nacrées aux ornements dorés et du collier surmonté d'un saphir) et Poppée s'apprêtait à poser des questions sur la préparation et le déroulement du mariage de Livia, lorsqu'elles tombèrent nez à nez avec, de toutes évidences, des brigands en pleine tentative de vol sur la boutique d'à côté qui avait l'air -heureusement?- tout à fait fermée ce jour. Sur le coup de la surprise, la jeune femme s'arrêta net et lança un coup d'œil à Livia, avant de fixer les malfaiteurs. Etaient-elles censées faire quelque chose ? Poppée ne pensait décemment pas pouvoir laisser ça se faire sans réagir, mais il fallait également penser à elles ; d'autant plus que l'un des voleurs semblait grandement intéressé par leurs sacs et, certainement et à plus forte raison, parce ce qu'ils contenaient. Mais ce qui lui fit froid dans le dos, ce ne fut pas réellement l'idée de pouvoir perdre les achats qu'elles venaient de faire. C'était plutôt le regard de l'un d'entre eux, qui glaçait son sang par toute la rage et la noirceur qu'elle pouvait y percevoir. Elle était comme happée par toute cette colère et s'en arracha avec difficulté pour poser la main sur le bras de son amie, plus pour vérifier qu'elle soit toujours bien là que pour l'empêcher de faire quoi que ce soit.

« Livia ? Je n'ai pas l'impression que ces messieurs soient là pour s'amuser... »

Elle esquissa un léger sourire, plus poli que sincère (comment l'être dans cette situation ?), se préparant à les défendre ou les protéger magiquement si cela s'avérait nécessaire.

Pourquoi fallait-il toujours (ou presque) que dès que quelque chose va bien, même très bien, il y ait un truc pour venir rappeler que la vie est une chienne et le bonheur bien trop souvent passager ? Si Poppée était sur la réserve, Livia, elle, était clairement agacée. Il y avait de quoi, elle était bien évidement d’accord avec son amie, mais était-il bien prudent de s’en prendre à ces gens-là ? Ne valait-il pas mieux faire demi-tour ou, pourquoi, trouver refuge dans la boutique qu’elles venaient de quitter ? Loin d’elle l’idée d’être lâche ou quoi que ce soit, elle voulait juste être… Réaliste. Mais Livia semblait bien décidée à leur faire face : soit. Elles étaient après tout toutes les deux de bonnes mages, et pouvaient certainement s’en sortir, en combinant la magie arcanique de Poppée à la magie élémentaire de glace de Livia… Pas de quoi s’alarmer. N’est-ce pas ?

« En fait… »

En fait, non. Poppée sortait, évidemment, mais rarement seule. Elle était un peu la prunelle des yeux de ses parents, qui veillaient généralement à ce qu’un esclave l’accompagne dans ses déplacements. Et, de préférence, un (ou une, d’ailleurs) esclave qui savait tenir quasiment n’importe qui en respect. Mais pas aujourd’hui, et elle n’avait pas pensé à prendre quoi que ce soit d’autre qu’elle-même dans des vêtements, et sa magie. Que des choses qu’on ne pouvait pas oublier, en soi. Livia, elle, était pleine de ressource, et avait déjà sortie une arme. Sa verve était également tranchante, et tira un léger sourire amusé à la jeune Metellus et future Tenera qui tentait malgré tout de garder une expression neutre, la plus neutre possible. Montrer aux bandits qu’elle pouvait avoir peur était un signe de faiblesse qui ne pouvait que les enhardir. Prendre un air amusé, non pas forcément à cause d’eux mais parce que la hardiesse de la Tilani lui plaisait.

Jusqu’à ce que, peut-être, la situation ne dérape un peu plus. La jeune femme arqua un sourcil en entendant les bandits prendre la parole, surtout lorsque l’un des trois malfrats s’avança vers elle. La lueur dans son regard ne lui disait rien de bon, et elle eut tout juste le réflexe de faire dévier magiquement le couteau lancé en sa direction, avant de rembrunir.

« Je ne suis généralement pas pour la violence mais je crois que je peux me forcer un peu, aujourd’hui. Qu’est-ce tu en dis, Livia ? On va se laisser faire ? »

Poppée laissa Livia s’exécuter une première fois, se préparant simplement à intervenir si nécessaire, et gardant les deux autres mécréants du coin de l’œil. Son amie ne faisait pas dans la dentelle, mais sans doute était-elle celle qui avait raison : des cristaux de glace emprisonnèrent lentement mais sûrement dans la glace celui qui n’avait qu’une arme physique pour se défendre (ou agresser, dans ce cas précis) jusqu’à ce qu’elle ne le recouvre entièrement. Ceci fait, Livia donna un coup sur le bras armé de l’homme qui éclata en millier de cristaux, lui rappelant le fait qu’on coupait parfois la main aux voleurs.

Si Poppée aurait presque applaudi, ce petit spectacle ne semblait pas au goût des deux autres voleurs ; le premier, le plus gringalet des deux, semblait plus sur la défensive que le second... Et pour cause : ce dernier tenta une attaque sur Livia, épée et dague en avant, tandis que son « ami » fuyait. Poppée ne se posa pas de questions ; elle se servit de la magie qu’elle avait emmagasiné et préparée pour dresser un bouclier entre son amie et leur attaquant, pour lui épargner un premier choc et lui laisser le temps de se remettre, voire de répliquer. Elle-même n’était pas très au fait avec tout ce qui était offensif, comme elle l’avait dit un peu plus tôt, Poppaea évitait la violence autant que possible... Alors qu’elle adorait élaborer des stratégies militaires. Elle n’avait simplement pas beaucoup pratiqué tout ce qui servait à attaquer.