Le Dit du Sang (Marian & Céleste)

Chère Marian

crains que cette missive ne vienne perturber la sainte tranquillité de votre ordre. Si vous craignez de faire acte de sédition, brûlez-la et priez Andrasté que l’on vous épargne. A contrario, si vos sentiments sont jumeaux des miens, si vos craintes se reflètent à la flamme qui calcine Kirkwall, poursuivez.

Les coursiers qui reviennent des Marches Libres indiquent que la guerre penche en faveur des mages. La cité est en bonne voie de devenir le premier bastion thaumaturge de Thedas et mon cœur ne peut que s’en réjouir. Toutefois, le répit accordé ne sera que trop court. Déjà Faustine réunit ses armées et ourdit sa terrible vengeance. Elle erre dans les couloirs de la Grande Cathédrale en vociférant, fait jouer les grandes messes et harangue les foules. Quelques fariboles suffisent à aiguillonner la haine de l’Etranger et du Bizarre. Ses forces seront bientôt rétablies et elle les jettera avec le fanatisme des despotes sur toute forme de magie.

Sur ses lèvres, ne demeurent que le mot oblitération. J’ai encore assez d’influence pour retenir sa main, empêcher que les enfants soient noyés dans des puits de sang. Pourtant, à la moindre défaillance de ma part, l’irréparable adviendra et même si je ne sais lire dans les astres, le fatum me fera trébucher.

Il me faut donc agir en traître. Par Andrasté, ma main tremble alors que j’écris ce mot fatal. Je mettrai fin à cette folie, dussais-je périr et damner mon âme éternellement. M’aiderez-vous à rétablir la paix, à éviter les massacres ? Vous engagez-vous à subir le déshonneur et la honte, à voir votre nom traîné dans la boue des mensonges, votre ordre réduit en cendres ?

Si à toutes ses questions, vous répondez par l’affirmative, faites le moi savoir. La célérité est requise. Marian, sachez que je regrette de vous voir mêler à cette périlleuse entreprise car je sais le prix que vous accordez à votre tranquillité. En tant que Main Droite et amie, je suis consciente que cette dernière n’est que le prix du travail accompli.
Je compte sur vous.

Avec toute ma tendresse,

Chère Céleste

ar le Créateur, je remercie que nos échanges soient codés, je n’ose imaginez les troubles que nous aurions si ces courriers interceptés tombaient dans de mauvaises mains. Et ma tranquillité est déjà dérangée ; je gardais les Chercheurs loin de Kirkwall pour une bonne raison, ce n’est pas pour rien que la majorité est à Therinfal. J’ai juré de protéger la Chantrie, mais les nouvelles que vous me donnez ne le sont pas tant que ça ; j’avais connaissance de troubles à Kirkwall depuis un moment, tout comme Faustine, à qui j’ai déconseillé les nominations qu’elle a faite de la Révérende-Mère et du Chevalier-Capitaine après les évènements précédents cet été ; mais elle ne m’a pas écouté, bien évidemment. Je me suis donc éloignée, moi et mes Chercheurs de cette défaite annoncée, offerte par Faustine elle-même, au final.

Mais les nouvelles que vous me faites parvenir m’inquiètes au point que je vais devoir quitter la tranquillité de mon ordre pour vous rejoindre à Val Royaux ; si trahison il doit y avoir, je compte sur vous pour assurer nos arrières, vous y êtes probablement plus habilitée. Envoyez vos prochaines nouvelles à Caer Oswin, je devrais y être à ce moment là dans mon voyage. Je confie mes hommes dans une neutralité jusqu’à ordre contraire au Sous-Seigneur, et les laisse à Therinfal sauf pour ceux en mission ou en aide à cause de l’Enclin.

Je dois d’ailleurs vous prévenir d’une chose étonnante qui m’est parvenue ; d’énormes quantités de lyrium ont transité vers Kirkwall, mais elles n’auraient pas été commandées par les mages ; de même des quantités similaires ont été envoyée à Val Royaux, mais non pas pour le Cercle, directement à la Chantrie. Faustine m’a également demandé si je pouvais lui prêter un Chercheur ; j’ai fait sourde oreille.

Je ne sais pas ce qu’elle prépare, mais j’ai toujours juré protection à la Chantrie, et la Divine semble devenir un danger pour sa propre institution. Et non, je ne dis pas cela car je ne l’ai jamais aimée, et m’excuse si cela heurte vos sentiments d’une manière ou d’une autre. Mais pour m’écrire comme vous le faites, les choses doivent être effectivement bien grave.

Qu’Andrasté veille sur vos arrières ;

Chère Marian

cœur las ne peut que se réjouir de votre bienheureuse compagnie. Qu’il est fatigué par les faux-semblants et les trahisons ! J’espère vous trouver aussi forte et en bonne santé qu’à notre dernière rencontre car notre chemin sera long. J’ai fait jouer l’un de mes contacts dont vous critiquerez peut-être la triste renommée. Toutefois, si elle n’a pas trouvé la Grâce de notre Créateur, on peut compter sur son appétence pour la monnaie sonnante et trébuchante dont elle est fort friande. Elle nous aidera à quitter Val Royaux et à rejoindre des contrées plus clémentes.

De peur que vous tombiez au combat ou entre des mains ennemies, je ne peux vous en révéler plus sur notre destination et vous demande une totale confiance. Sachez juste que j’ai, en ma possession, un document signé de la main de notre bienaimée Beatrix IV. Nous devrons laisser derrière nous nos anciennes identités et revêtir la sombre bure de l’anonymat mais nous reviendront. Je vous le promets.

Par cette lettre, j’abandonne en secret mon rôle de Main Droite de la Divine. Je n’appliquerai plus ses règles, ne me soumettrai plus à ses lois, et ne forcerai quiconque à plier genoux devant un imposteur de cette envergure. J’ai cru, pendant longtemps, qu’il demeurait de la lumière en elle. Je me trompai lourdement. Est-ce l’orgueil, l’amour ou autre chose qui m’aveugla à ce point ? Je ne le saurais sans doute jamais.

Il est maintenant clair que le lyrium que Faustine destine à la Chantrie n’est là que pour servir d’abominables projets. Nous savons toutes deux ce que cette substance produit sur nos frères templiers et je gage qu’elle tente d’en augmenter les effets afin de s’assurer d’une totale obéissance de sa future armée. Vos doutes étaient fondés depuis le début. Pardonnez-moi, j’aurais dû prêter une oreille plus attentive à vos avertissements.

Ma Sœur, nous nous retrouverons au port de Val Royaux à la nouvelle lune. Attendez l’heure habituelle puis signalez-vous comme à l’accoutumé. Nos gens seront présents et je pourrais enfin vous délivrer l’entière vérité.

Brûlez cette missive. Qu'Andrasté vous protège.

Chère Céleste

e ne devrait guère m'étonner de ce que vous m'apprenez, vous connaissez mon avis sur celle qui nous préoccupe et ses manières. Je n'étais manifestement pas la seule, si le document que vous évoquer est ce que je pense être; connaissant notre bonne et regrettée Béatrix, j'espère que mes théories seront bonnes, peu importe la complexité et la gravité de ce que cela va impliquer, je mettrais les forces qu'il faut dedans. Et je remercie Andrasté qu'une telle chose soit tombée entre vos mains plutôt qu'entre celles de vous savez qui ou de l'autre Main. Connaissez-vous d'ailleurs la position de la Gauche dans toute cette affaire ?

Je ne connais pas vos contacts, mais je vous fait confiance et vous prête mon épée au besoin, dussé-je me battre si les choses tournaient mal. Je ne connais pas vos plans non plus, mais je me répète, j'ai autant confiance en vous que vous avez confiance en moi. La Chantrie est au plus mal et vous êtes sa potentielle salvatrice, j'en ai conscience, bien plus que moi.

Je dois couper court à cette lettre, je suis restée la plus évasive possible et votre précédente dort en cendres, mais brûlez-la également, nous sommes à une erreur de l'échec, je le crains. J'ai un contre-temps, la personne devant me remplacer à la tête des Chercheurs durant mon absence a été retrouvée morte. Cela ne m'empêchera cependant pas d'atteindre notre lieu de rendez-vous en temps et en heure. Je vous y retrouverai. Prenez garde à vous en attendant;

Qu'Andrasté veille sur vous;