Cats and dogs | ft. Hecate

Ce n'était pas la première fois que Flore de Savrenne revenait à Tevinter depuis son émigration vers Orlais.

Ce n'est pas que son pays natal lui manquait. Elle ne gardait pas un bon souvenir de sa jeunesse tevintide, et sans doute n'aurait-elle jamais songé à y remettre les pieds sans les quelques invitations qu'elle avait reçues au cours de sa vie professionnelle. Une fête organisée par un riche marchand amateur de musique... Un rendez-vous lyrique organisé par une ambassade... Ou, dans ce cas-ci, un festival réunissant des artistes d'un peu partout à Thédas. Ce genre d'événement était assez rare, surtout dans un endroit tel que Tevinter, alors quand elle y avait été conviée, Flore avait sauté sur l'occasion : pas question de passer cet honneur, même si ça impliquait de faire un bref retour à la maison. Et puis, après tout, pourquoi aurait-elle du s'en priver ? Elle était une femme libre de faire ce qui lui plaisait.

Sa représentation n'avait pas été aussi applaudie qu'elle l'aurait été à Orlais, mais il fallait s'y attendre. A Minrathous, applaudir une cantatrice orlésienne aurait sans doute semblé être une faute de goût - et le Créateur savait que les gens d'ici pouvaient être hypocrites.

En tout cas, ça ne l'avait pas empêchée de se présenter à la réception à la fin de la journée vêtue d'une de ses plus belles robes, regrettant simplement que son époux n'ai pas pu venir avec elle. Il était parti à l'aventure à explorer des ruines quelque part, laissant sa petite famille en plan... Quant à Petra, elle était restée à Orlais avec les enfants, préférant éviter de visiter Tevinter, étant une elfe. S'ils lui manquaient, Flore n'en laissait rien paraître... Se promenant entre les invités, un verre de vin à peine entamé à la main (elle tenait hélas très mal l'alcool, et avait pris l'habitude de boire lentement) et l'air parfaitement à son aise dans cette salle pourtant probablement hostile.

En vérité, ce n'était ni à Alexandre, ni à Petra, ni même à ses enfants qu'allaient ses pensées. Elle était plutôt en train de réfléchir à son père. Flore avait pris l'habitude d'envoyer une invitation à ses parents à chaque fois qu'elle se produisait à Tevinter... Non qu'elle se soit jamais attendue à ce qu'ils viennent, ou parce qu'elle avait envie de les revoir : simplement pour leur exposer son succès bien en face. Était-ce inutilement vantard ? Probablement, mais elle n'avait jamais prétendu être exempte de vanité.

En tout cas, cette fois-ci, elle avait encore une fois tenté d'envoyer la traditionnelle invitation... mais la réponse avait été plutôt surprenante. Le messager lui avait en effet signalé que le magister Nehalias était mort... Devait-il quand même faire passer le message ? Pas la peine, avait-elle répondu en faisant comme si l'information n'avait pas la moindre importance à ses yeux. Et pourtant, elle ne parvenait pas à le sortir de sa tête.

Son père, mort ? Elle ne l'avait plus vu depuis plus de dix ans. Elle se souvenait à peine de lui, en fait. Et pourtant, le fait de ne pas avoir été au courant la froissait. Et le fait qu'elle en savait si peu sur les circonstances de ce décès n'aidait pas. N'aurait-elle pas du être mise au courant ? Elle aimait espérer que si elle venait à mourir, elle, son mari et son amante préviendrait sa famille tevintide, ne serait-ce que pour les tenir au courant. Elle sourit intérieurement en imaginant sa mère et sa sœur en visite dans une Chantrie sudiste pour assister à ses derniers rites, toutes vêtues de noir... enfin, elle ne rêvait pas trop, probablement snoberaient-ils l'événement comme chacun de ses concerts.

Gourmande, elle attrapa un canapé sur le plateau d'un serveur (probablement un esclave, dans ce pays de misère) et le dégusta (excellent, il fallait avouer) quand son regard croisa deux yeux qui lui semblaient familiers. Elle du y regarder à deux fois avant que les idées se mettent en place dans sa tête.

Hécate ? Sérieusement ?

Elle s'approcha de la blonde - cette inconnue qui devait être sa sœur. Est-ce qu'elle était conscience qu'elle se trouvait là ? Elle salua froidement la personne qui discutait avec Hecate avant de tourner vers elle un sourire des plus froids. Depuis combien de temps n'avaient-elles plus eu l'occasion de converser ? "Et tiens donc. Je ne m'attendais pas à voir un visage familier par ici."  

C'était bel et bien Hecate qui lui faisait face... Sa petite sœur perdue depuis des années, une trace de sa famille qu'elle avait abandonnée le jour où elle était partie recommencer sa vie à Orlais. On pourrait croire que des retrouvailles entre deux sœurs séparées par la vie auraient été emplies d'émotion et de bons sentiments, mais ce n'était pas le cas en ce moment. Manifestement, Hecate n'avait pas changé, ou peut-être même avait-elle empiré, depuis leur enfance en commun. Son attitude, dès que Flore l'aborda, fut celle d'une femme méprisante, préférant cacher son lien avec son ainée et prétendre ne pas la connaître.

Mais ce n'était pas ça qui allait empêcher la cantatrice de continuer cette conversation. L'occasion ne se représenterait plus... et elle n'était pas le genre de personne à tourner le dos à ce genre de défis. 

Elle répondit avec un grand sourire. "Ce n'est pas comme ça qu'on parle à sa grande sœur, Hecate de mon cœur. Surtout après tant d'années de séparation." L'ironie de ces propos était évidente, l'hypocrisie dans son sourire aussi. Flore n'avait pas envie d'offrir à Hecate la satisfaction de la laisser tranquille. "Mais je suppose que le don de la politesse n'est pas donné à tout le monde."

Flore était devenue très orlésienne dans sa façon de traiter ses ennemis, et ça se ressentait encore plus dans ce pays étranger. Elle n'avait aucune honte de son attitude : son seul regret était de ne pas avoir ses partenaires sous la main pour lui prêter main forte... Petra et Alexandre auraient très certainement déplu à la bonde, ça aurait été bien drôle à voir.

-"Je n'ai besoin de l'autorisation de personne pour revenir visiter ma contrée natale, ma chère. Et j'ai été invitée à chanter." Avait-elle vu sa représentation ? Si c'était le cas, pourquoi avait-elle été si surprise de la voir à la fête ? Peut-être était-elle simplement arrivée pour la soirée mondaine. Ca ne l'aurait pas surprise. Sa sœur manquait de goût, et la musique, d'où qu'elle vienne, devait lui passer par dessus la tête.

Hécate n'essayait pas de sembler agréable, même hypocritement : clairement, rencontrer sa sœur aînée dans un lieu public comme celui-ci la mettait hors d'elle. Sans aucun doute avait-elle fait tout ce qu'elle pouvait pour que Flore soit oubliée par la haute société ces dernières années, et l'idée que cette dernière ne viennent gâcher ses efforts l'inquiétait. En toute franchise, la cantatrice aurait sans doute été pareille si elle avait rencontré Hécate à Orlais. Elle avait fait de son mieux, depuis son émigration, pour minimiser l'importance de ses origines tévintides, mal vues chez les orlésiens... Que les nobles de là-bas apprennent qu'elle avait une sœur mage à Tevinter, et sa réputation en pâtirait.

Mais ce n'est pas pour autant qu'elle comptait laisser sa cadette tranquille. Au contraire : la savoir agacée l'amusait, et la tentait d'en ajouter une couche.

-"Oh, je suis d'accord avec toi sur ce point. L'organisateur a clairement des goûts douteux en matière d'invité. Après tout, il t'a laissée entrer." répondit-elle du tac au tac à la pique de la mage. En vérité, leur hôte n'avait sans doute pas la moindre idée de leur relation, les invitant toutes deux par hasard... ignorant totalement toutes les complications que ça pourrait causer. Même si, vraisemblablement, beaucoup des invités qui discutaient autour d'elles apprécieraient le spectacle, si leur dispute se faisait plus visible.

Hécate mentionna la mort de leur père. Si Flore n'avait pas appris la nouvelle un peu plus tôt, elle aurait probablement été très surprise... Pour le coup, elle se contenta de répondre avec un ton de reproche dans la voix.

-"Je l'ai entendu dire, oui. Paix à son âme. Et merci beaucoup de m'avoir prévenue si vite." Elle plissa les yeux. "J'imagine que je n'ai pas été mentionnée dans son testament ? S'il se souvenait aussi bien de moi que toi, il n'y a pas de risque..." Hériter d'argent Nehalias ne l'intéressait pas trop, financièrement, vu les richesses de son mari, elle n'était pas à plaindre.

En vérité, elle ne savait pas vraiment si le décès du paternel l'attristait ou non. Elle n'était pas attachée à son père, mais il restait son père. Lui avait toujours été très distant avec elle... peut-être à cause des rumeurs qui affirmaient, à l'époque, qu'elle était le fruit d'une relation extra-conjugale. Rumeurs fondés ? A présent que le vieil homme était mort, elle ne le saurait jamais.

-"Mais ne parlons pas tant du passé, sœurette. Que deviens-tu ? Tu m'excuseras, mais l'orlésienne que je suis ne s'est pas vraiment tenue au courant." Elle était vaguement curieuse, mais avait en vérité surtout envie de parler d'elle-même. Montrer à sa sœur qu'elle réussissait parfaitement sa vie à l'étranger serait un vrai plaisir.

Hecate profita de la question de Flore pour mentionner le reste de leur fratrie, "une petite sœur et un petit frère", dit-elle, qu'elle jugeait comme bien plus intéressants qu'elle - comme si c'était possible. Flore, il fallait l'avouer, avait presque oublié l'existence de ces deux-là. Oh, elle avait bien eu vent de leur naissance, à une époque où elle s'intéressait encore un peu à ce que faisait la famille Nehalias de l'autre côté de la frontière, mais elle ne les avait jamais vu. Probablement le les rencontrerait-elle jamais. En fait, il y avait des chances pour qu'ils ignorent tout de son existence. Pouvait-on réellement parler de "frères et sœurs" dans ces conditions ? "Hmpf. Ce n'est pas comme si j'avais besoin de votre argent." Même pour une noble orlésienne, Flore était fort riche, grâce à la fortune de son mari.

La blonde n'hésita ps avant de répondre à l'autre question de Flore : manifestement, elle n'avait entendu que ça, l'occasion de révéler ce qu'elle faisait aujourd'hui de sa vie. Et pour cause. "Un siège au Magisterium", lâcha-t-elle avec un sourire de satisfaction... sûre d'impressionner son aînée. Un siège au Magisterium, ce n'était pas rien.

Ca n'était pas pour plaire à la Cantatrice, et il lui fallu utiliser tout ce qu'elle avait appris sur le jeu d'acteur et les bonnes manières à Orlais pour continuer à sourire hypocritement. Magister ! Si l'un de ses détracteurs l'apprenait à la maison, si des bruits couraient sur la profession de sa propre sœur, elle n'aurait pas fini d'en entendre parler. Il n'avait déjà pas été facile de prendre assez de distance avec ses origines pour pouvoir briller dans la société orlésienne, ce n'était pas pour que ceci vienne tout gâcher... Heureusement, les deux empires étaient en s mauvais termes que ce genre de nouvelles circulait très mal. Mais il faudrait en discuter avec Petra. Au cas où.

Il y avait une autre raison pour que la nouvelle déplaise à Flore, et c'était que dans la compétition qu'elle semblait désormais avoir avec sa cadette, un poste de Magister... c'était difficile à battre. Certains altus passaient leur vie entière à la poursuite d'une de ces places : à Tevinter, il était difficile de faire mieux, à moins de devenir Archonte - et encore, c'était débattable. De son côté, Flore n'avait rien à montrer : sa famille avait toujours gardé ses distances avec la politique et le Grand Jeu orlésien, attitude parfaite pour rester en vie, mais peu recommandée pour impressionner sa petite sœur insupportable.Continuant pourtant de faire bonne figure, Flore répondit,parce qu'il fallait bien : "Tu m'en diras tant. Père devait être très fier." A moins qu'il ne soit mort avant. Dans tous les cas, si Hecate voulait rester dans le moule de la parfaite Altus, qu'il en soit ainsi. Elle-même avait préféré privilégier son propre bonheur. "J'ai toujours songé que les artistes restent dans les mémoires là où les politiciens vont et viennent sans laisser de marque, ne trouves-tu pas ?", continua-t-elle comme si elle s'interrogeait à voix haute. "Pour n'importe quelle époque, je serais capable de te citer les peintres et les compositeurs les plus influents, mais demande moi de dire qui siégeait au conseil impérial, et je dois donner ma langue au chat. Mais, oh, bien sûr - tu peux faire ce que tu veux de ta vie, très chère."

Elle marqua une pause. "Enfin, oui, je suis cantatrice - dans des endroits bien meilleurs que ceux-ci habituellement, même si, à priori, c'est à une de ces 'réceptions douteuses' que je devais me rendre pour te rencontrer." Elle aurait pu citer ses accomplissement, ses critiques, ses plus grand rôles, mais qu'est-ce que la mage y comprendrait ? Clairement, elle n'avait pas une once de bon goût. "Oh, et j'ai fondé une famille, aussi." Elle ne perdait jamais une occasion de vanter ses proches. "Enfin, ils sont restés à Orlais, bien sûr... Ils ont été bien inspirés, j'aurais du en faire de même." Elle saisit délicatement le médaillon ovale qu'elle portait et l'ouvrit avec un clic imperceptible. A l'intérieur se trouvaient de minuscules portraits d'Alexandre et Petra, semblant légèrement plus jeunes qu'aujourd'hui - ils avaient été peints pour leur premier anniversaire de mariage.

Si Flore était impressionnée, elle ne tenait pas à le montrer à Hecate. Être magister, de toute façon, à quoi ça lui servirait ? Des magisters, il y en avait eu des tas avant elle, et il y en aurait des tas après. Peut-être que certains avaient laissé une marque sur leur pays, mais les autres ? Leur parents avaient peut-être été fiers d'eux, un jour, mais à présent, la plupart des gens les avaient oubliés.

Non, il n'y avait que l'art qui était réellement immortel. Mais bien évidement, ça, Hecate ne le comprendrait pas. Et elle ne comprenait pas non plus la beauté d'avoir une famille comme la sienne... Enfin, peut-être que ça s'expliquait parce que personne n'aurait voulu vivre avec elle. Flore sourit intérieurement et se promis de ressortir cette pique à sa cadette dès qu'elle pourrait.

Elle fronça le nez en répondant :

-"Sur ce point, au moins, nous sommes d'accord, heureusement que je suis partie. Tout est d'un mauvais goût, ici..."

A commencer par ces couleurs sombres... Les tévintides savaient-il seulement qu'on pouvait s'habiller autrement qu'en noir ? Flore, elle, préférait les couleurs vives. Ce jour-là, elle était en vert émeraude, et, clairement, elle se distinguait parmi les locaux. Et c'était très bien comme ça.

Hecate lui parlait à présent de son mari, prouvant, encore une fois, qu'elle ne comprenait rien à ce genre de choses.

-"Bien sûr, qu'Alexandre est au courant." Elle secoua la tête, continuant sur un ton de mépris. "Ca s'appelle 'avoir une relation aimante et de confiance'... Tu devrais essayer."

Bien sûr, ce n'était pas si simple. Oui, Alexandre savait qu'elle venait de Tevinter, comme certains autres proches et amis rencontré à l'université, mais elle avait quand même tout fait pour minimiser l'importance de ses origines aux yeux de la société orlésienne. Elle ne tenait pas à ce qu'une bêtise pareille ruine sa carrière musicale. Et à présent, pour couronner le tout, elle avait une sœur Magister ? Il valait mieux que tout ça reste à Tevinter.

-"Comment va notre mère, en parlant d'elle ? Elle n'est pas parmi nous ce soir, j'espère... Ce serait trop de mauvaises rencontres en une soirée."

Hecate pouvait toujours jouer du sarcasme si elle voulait, mais elle avait raison : les orlésiens avaient bon goût. Un goût un peu excessif, parfois, peut-être... Il y avait des modes que même elle ne pouvait défendre... Mais globalement, en tout cas, ils avaient bien meilleur goût que les tévintides et leurs déprimants costumes noirs. A Orlais, au moins, on s'amusait !

-"Oh, Hecate, je suis désolée. J'imagine que c'est vrai, tout le monde te ment. Ca doit être difficile à vivre. Peut-être que ça changerait si tu étais un peu plus sympathique."

Dire que les gens étaient plus sincères à Orlais qu'à Tevinter aurait sans doute été faux... Le Grand Jeu n'étais pas célèbre pour rien. Mais Flore n'y jouait pas, Flore avait depuis longtemps abandonné toute idée de se mêler à la politique ; elle prenait le meilleur d'Orlais sans en garder le plus dangereux. Si on se contentait du titre de Comtesse et de l'argent de la famille de son époux, on pouvait passer d'excellentes soirées festives sans se préoccuper de poison glissé dans son vin.

-"Vol Dorma ? Elle vit toujours dans ce coin perdu ?" Certes, il n'y avait aucune raison pour laquelle la mère Nehalias aurait du déménager, mais tout de même ! Même avant qu'elle ne pense à émigrer de Tevinter, Flore avait déjà envie de quitter Vol Dorma. "Tu devrais lui dire que tu m'as vue..."

Mais Hecate n'en ferait sans doute rien, et elle se surprit à le regretter. Ce n'est pas qu'elle était triste de ne plus avoir de relation avec sa famille, pas exactement, non, elle supposait, mais... Et bien, elle même avait un lien très fort avec ses enfants. S'imaginer dans une telle situation, à ne plus jamais les voir, à être en conflit avec eux... Elle se demanda si sa mère regrettait parfois la façon dont tout ça s'était passé.

Sa sœur lui demanda ensuite quand elle comptait rentrer chez elle. Impatiente ? Flore l'était aussi...

-"Je compte repartir demain." Elle esquissa un sourire. "Encore que, peut-être que je devrais m'attarder un peu... Faire un petit tour à Minrathie, visiter, tout ça... Ca fait si longtemps !" C'était un mensonge total, pour le coup, elle n'avait en aucun cas envie de rester pour faire du tourisme : la seule envie qu'elle avait était celle d'agacer sa sœur. "Enfin, de toute façon, je compte bien profiter de la soirée d'aujourd'hui jusqu'à la fin. Après tout, le vin n'est pas trop mauvais. Il y a des gens que tu connais, ici ? On pourrait aller papoter ! Ou danser... C'est d'un statique, ces fêtes tévintides, c'est pathétique."

Oui, probablement était-il inutile de dire à la mère Nehalias que Flore était passée par Tevinter. Probablement s'en moquait-elle bien - ou, du moins, refuserait-elle d'admettre le contraire. La Cantatrice espérait que rien ne la sépare jamais ainsi de ses enfants. Quels que soient leurs choix... Elle se devait de les accepter et de les soutenir.

Elle ravala un soupir et s'abstint de tout commentaire. Elle n'avait pas besoin de cette famille, de toute façon. Sa famille était à Orlais. Ce n'était pas elle qui était à plaindre, dans cette situation. C'était plutôt eux tous, qui l'avaient perdue et ne se rendaient même pas compte de cette perte.

Hecate n'avait pas bien pris sa plaisanterie. Clairement, elle ne tenait vraiment pas à ce que qui que ce soit apprenne leur lien de parenté. Elle en venait même aux menaces, lui promettant de lui rendre la vie impossible même à Orlais si les choses devaient se savoir. Flore ne doutait pas qu'elle en serait capable - ou, au minimum, capable d'essayer. Il faudrait en parler à Petra, à son retour, pour surveiller le sujet... Dans tous les cas, Flore ne tenait pas se mettre en danger pour Hecate, ou mettre en danger sa famille. Aussi répondit-elle, prenant une voix agacée :

-"Très bien, madame la Magister. Je m'abstiendrai." Elle leva les yeux au ciel. "Heureuse de voir que tu n'as toujours  aucun sens de l'humour. Ce serait dommage, ça te rendrait presque intéressante."

Elle n'avait plus envie de parler avec sa sœur - ni même de la voir, en fait. Se lancer des piques était une chose, mais en venir à de véritables menaces en était une autre... Et, clairement, leur conversation n'irait pas beaucoup plus loin quoi qu'il en soit. Elle claqua la langue. "Ai-je mentionné que cette fête était ennuyeuse à pleurer ? J'ai passé de meilleures soirées à Ferelden." Un point qu'elle avait déjà soulevé, mais elle le faisait surtout pour sauver la face. Elle avait clairement envie de rentrer chez elle, à présent - ou du moins, de rentrer à son auberge pour commencer son voyage le lendemain - mais elle ne voulait pas qu'Hecate ai l'impression qu'elle avait réussi à la faire fuir. "Amuse-toi bien avec tes nouveaux amis magisters, très chers. J'ai réellement mieux à faire que de m'en préoccuper."

Elle était prête à partir... elle valait mieux que tout ceci.