Shall we talk ? | ft Melisende

C’était la guerre. Dans quelques jours à peine, l’alliance entre les mages libres et l’Inquisition partirait à l’assaut d’une base secrète appartenant aux templiers fidèles à Felix Seneca. L’assaut, très secret, avait poussé Arda et ses alliés à rejoindre la ville de Kirkwall. Car, bien sûr, la naine participerait à l’opération : elle doutait sérieusement de la capacité des autres à en faire quoi que ce soit d’utile sans elle… Et visiter la Ville des Chaine ne la dérangeait pas, au contraire. L’endroit était rempli de gens intéressants… Comme par exemple une certaine Melisende Seneca.

Arda, personnellement, considérait que toute tragédie pouvait présenter ses avantages… En l’occurrence, la fille mage de son ennemi, probablement pleine de ressentiment et d’informations privées à son propos, était du pain béni pour une femme comme elle. Dès qu’elle avant entendu parler de Melisende, elle avait eu envie de lui parler. Et dès qu’elle avait eu vent de son arrivée à Kirkwall (passé la légère déception, elle aurait aimé la voir rejoindre les rangs de l’Inquisition), elle avait décidé de la contacter. Et ce, par elle-même, sans prévenir ni l’Inquisiteur ni Iris Seiel.

Ce n’était pas une question de méfiance en tant que tel. Elle avait beaucoup de respect pour l’archimage, et ne comptait pas mettre fin à leur collaboration de sitôt. Mais elle doutait que cette dernière approuve de son approche vers cette jeune femme qui méritait sans doute qu’on lui fiche la paix. Elle était trop protectrice… Une faiblesse, aux yeux de la naine. Mais plutôt que de s’attirer ses suspicions, elle avait pris le parti de prendre contact avec la jeune mage en privé, cherchant une alliance par rapport à leur ennemi commun. Elles avaient échangé quelques lettres… mais à présent que toutes deux se trouvaient, pour la première fois, dans la même ville, elle voulait sauter sur l’occasion pour lui parler en face à face. Il n’y avait pas de meilleur moyen pour juger quelqu’un.

Et il était encore plus efficace de rencontrer les gens à l’improviste, sans qu’ils n’aient réellement eu le temps de se préparer, et c’est pourquoi Arda arrivait sans rendez-vous, armée uniquement d’un sourire, d’une bouteille de vin, et d’une dague cachée à l’intérieur de son manteau.

Elle frappa à la porte.

-"Mademoiselle Seneca. Ou puis-je vous appeler Melisende ?" Elle sourit, un peu doucereuse, les yeux levés vers le visage de la jeune femme. Vu ce qu’elle avait traversé, il était probable que cette dernière préfère qu’on évite de l’appeler par le nom de son père. Arda se plaisait à faire attention à comment elle appelait les gens, en fonction de comment elle voulait les faire se sentir. A l’aise, en tort, dépassé ? Tout se jouait souvent à un titre, à un mot, à un vouvoiement... Ici, elle cherchait l’équilibre très apprécié d’amical-qui-en-sait-beaucoup, l’amabilité qui pourtant ne met pas tout à fait à l’aise. En toute franchise, c’était son registre préféré. "C'est un plaisir d'enfin vous rencontrer en chair et en os. Vous êtes aussi charmante qu'on me l'a dit." C'était en effet l'une des choses qu'elle avait entendu dire de la jeune femme, une chose sur laquelle tous ses témoins s’accordaient. La fille de Felix Seneca était une beauté, tellement qu’on était en droit de se demander comment un homme tel que lui avait pu donner naissance à une enfant pareille. Mais la beauté n’était jamais qu’une façade, et Arda espérait découvrir ce que celle-ci cachait réellement. Quelque chose d’utile, espérons. "Je suis Arda – nous nous sommes déjà parlé. Je suis heureuse d’enfin vous rencontrer. J’espère que je ne vous dérange pas."

Elle regarda autour d’elles. La rue était tranquille... Pourtant, elle préférait avoir cette conversation en privé. "Vous êtes seule ? Peut-être devrions-nous entrer. Je vous ai apporté une bouteille…"