-① oh ! quand la mort, que rien ne saurait apaiser. ☾ sextus

oh ! quand la mort, que rien ne saurait apaiser.

─ nous prendra tous les deux dans un dernier baiser ─

≪ - ...Buarf ! Ça pue l'hypocrisie, ici ! ≫ fis-je soudainement alors que je regardais le corps de ma sœur brûler sur une embarcation tel un véritable feu de joie. Je ne pouvais pas m'empêcher, c'était plus fort que moi. Quitte à ce que ma mère ne cesse de me donner des coups de coude pour que j'arrête de faire honte à la famille Admis tandis que mon jeune frère me jetait son regard le plus sombre, comme s'il était sur le point de me trucider. Pourtant, je n'avais pas totalement tord. La plupart des personnes ici présentes étaient bien souvent des nobles, venant se racheter une conscience en démontrant une certaine pitié factice à l'égard de la prunelle de la famille qui avait été salement arrachée. Et nous, dans tout ce bordel, nous n'étions qu'une riche famille marchande, ayant réussie à s'élever avant de se brûler durement les ailes. Voilà ce qui arrive lorsque l'on veut se soustraire à notre position et que l'on a les yeux plus gros que le ventre ! On perd ce qu'il y a de meilleur ! Parce qu'entre nous, elle avait beau être une femme, elle allait quand même presque anoblir notre nom, et ça, c'est pas rien ! C'est pas mon frère, ce guerrier furibond à la gueule de mabari et moi qui avait passé l'âge pour ces conneries en plus d'être un bon à rien fini qui allait sauver notre nom de la crise. ≪ - ...Entre nous, j'pense que vous devez essayer d'avoir une autre jolie petite fille. ≫. La gifle tombe d'elle-même venant de la matriarche qui gueule en même temps mon titre en entier. Giovanny Zanipolo Amdis. Il me faut quelques temps avant de saisir ce qu'il me vient d'arriver. D'être giflé... Devant tout le monde. Je décide donc de m'écarter quelques temps de la population afin d'éviter une honte générale qui suivrait par les réactions qui tomberaient automatiquement. La vérité, c'est que je ne voulais pas pleurer. C'était stupide et pourtant, qu'est-ce qu'on dirait si on voyait un homme de ma condition pleurer !? En vrai, je suis sûr que l'on ne m'en voudrait pas. Même Zenith, il pleure alors que c'est un dur. Je crois que mes parents n'attendaient que ça. Que j'ai de la compassion pour celle qui fut la fille parfaite. Et la vérité, même si en tant que mioche je m'étais dis que si elle disparaîtrait, ça me ferait des vacances, aujourd'hui, je regrettais de ne pas avoir eu plus de moments agréables passés ensemble. Je voulais la retrouver, faire en sorte à ce qu'elle renaisse à nouveau tel un phénix. Après tout, elle n'était pas n'importe quelle femme. Elle était une mage aussi ! Et une mage puissante, qui plus est. Un peu trop pour croire que sa mort était dû à cause d'une banale esclave battue. Ouais, ce n'était pas très clair, tout ça. Du moins, jusqu'à ce que l'évidence arrive à mon niveau. Une évidence qui me fit sursauter subitement. Sextus Tilani... Le frère de mon beau frère ! Du moins ce qu'il en reste... L'homme paraît d'une gentillesse à tout épreuve et pourtant, je me tends automatiquement à sa présence, comme poussé par un instinct de survie. Mais je devrais peut-être fuir aussi ? ≪ - Oh ! Bonjour ! ≫ fis-je alors en le saluant d'un vague sourire et d'un signe de tête. ≪ - ...Je ne sais pas ce que l'on pourrait dire, par pitié, en ce qui vous concerne ? "Toutes mes condoléances" ou "Mes félicitations, vous êtes l'héritier de votre famille" ? ...Vous êtes libre pour un autre mariage ? Je suis sûr que Zenith pourra faire l'affaire ! Il est fort et robuste à tout épreuve ! Marché conclu !? ≫. Les paroles glissaient à la place des larmes. Car s'il y avait bien une personne devant laquelle je ne voulais pas perdre la face après ma mère, c'était bien le Tilani. Comme si je voulais lui prouver que rien n'était perdu. Qu'on avait beau être des marchands, on se serrerait les coudes. Rien n'était fini. C'était seulement la fin d'une ancienne ère.

Les cérémonies d’adieu étaient devenues choses tristement habituelles chez les Tilani ces dernières années. De terribles accidents réduisaient à peau de chagrin la fierté du Pater, ses six fils. Incidents, folie, maladie avaient privés la famille de déjà deux garçons, épouses et enfants. C’était le troisième qui venait de succomber, en compagnie de sa femme, à la folie d’une esclave maltraitée. Assassinat fâcheux, situation malheureuse, le deuil incombait les parents dont les traits tirés laissaient voir la profonde tristesse. Chez les frères, elle était également présente, mais plus nuancée ; les deux aînés, Quartus et Quintus semblaient tendus, inquiets et le cadet, Sextus observateur, malgré ses vêtements de deuil et son faciès accablé. Aucun sourire sur ses lèvres n’aurait su trahir ses intentions, déjà il prévoyait la suite, mais il lui incombait de s’attrister des circonstances ; il avait après tout, perdu, encore, un frère, et c’était bien malheureux.

Sa famille n’était pas la seul à souffrir d’une disparition ; celle de l’épouse, d’un rang plus bas, mais dont la magie et l’influence marchande avaient suffit à sceller le mariage. Elle avait été tuée au même titre que son époux, des coups de poignards à travers le corps, au point que le sang recouvre les draps, se confondant avec celui de son époux…Et de le leur enfant à naître. Une vraie tragédie. Sa famille avait naturellement été conviée à un évènement qui avait plus des allures de réceptions que de cérémonie de crémation. Et ils se faisaient déjà remarquer. Le regard vif de Sextus, scannant l’assemblée, ne manqua pas d’observer la scène qui se passait entre fils et mère, d’un ridicule certain et fort peu approprié à et Tevinter et un tel moment. Mais amusant, il devait le reconnaître, même si il ne le montrait pas ; la perte de leur attache à une telle famille ne serait donc pas un tel problème au final.

Enfin, celui qu’il identifia comme le fils ainé Llyr s’approcha de lui pour lui balancer un étrange monologue à la figure ; réelle tristesse d’avoir perdu sa sœur, folie déjà présente, tentative de poison verbal ? Peu importe, il n’était pas à point et Sextus avait du temps à perdre pour lui rappeler cette différence qui les séparait. Si ce dernier se montrait aussi verbal, il fallait bien quelqu’un pour lui apprendre comment réellement s’y prendre. La dernière proposition fut la première sur laquelle il rebondit, après avoir observé le concerné en penchant la tête. "votre frère est certes charmant mais il ne peut me donner d'héritier, un mariage n'aurait aucun intérêt....mes seules options restantes le concernant ne sont pas prononçables lors d'une cérémonie d'adieu." Sextus avait déjà une certaine réputation dont il s’amusait, si il n’en tirait pas même une sorte de fierté. Posant une main sur le dos de son interlocuteur, il l’invita, sans réellement laisser de choix, à continuer cette discussion dans un coin un peu plus à l’ombre. "je ne suis pas l'héritier, j'ai encore deux aînés préservés de la mort et qu'il me serait malheureux de me voir arrachés !" Il donna une touchante sincérité à ses mots ; aussi réelle que l’était sa virginité, mais l’important restait que ses mots, alors qu’ils passaient tout deux devant plusieurs invités, semblent réels. Une fois isolé, Sextus se pencha légèrement vers Leuconoe et lui offrit, sur le ton du conseil, un avis personnel "On peut voir que vous n'êtes pas habitué à de tels évènements...je vous souhaite sincèrement de ne pas y être convié à nouveau par la..force du destin " réelle inquiétude ou menace cachée, dur à dire, tant le jeu du Tilani était parfaitement dosé. Mais la partie avait commencé et il s’était fixé un but assez clair. Qu’il ne révèlerait pas de suite, bien entendu.