Le Deal du moment :
Pokémon EV06 : où acheter le Bundle Lot ...
Voir le deal

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas

Dim 15 Sep - 15:45

Il fallait le reconnaître : les orlésiens s'y connaissaient en terme de bals. C'était un domaine dans lequel ils se comportaient en experts, du moins toute la partie qui pouvait prétendre à ne serait-ce qu'une goutte de sang noble dans les veines. On avait la fête dans le sang, ou on ne l'avait pas. Peut-être était-ce parce qu'elle n'était qu'à demi orlésienne, mais Lucie Delagard ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle avait définitivement manqué le coche. Pourtant, ce n'était pas faute de savoir s'amuser : elle était aussi prête que n'importe qui à profiter d'une bonne soirée en bonne compagnie. Seulement... Il y avait quelque chose dans ces grands bals qui la mettait légèrement mal à l'aise. Comme si elle n'y avait pas vraiment sa place. Et ce même plusieurs années après son arrivée à la cour.

Quand elle avait découvert Val Royeaux, elle n'en avait pas cru ses yeux. Bien sûr, son père lui en avait parlé en long et en large dès qu'elle avait été en âge de comprendre ses mots, et il y avait eu les livres et les images qu'il avait emportées avec lui dans les Anderfels. Mais rien de tout cela ne l'avait préparée à la magnificence de la ville en personne. Les hauts bâtiments aux murs blancs, les flèches d'argent et d'or s'élevant au-dessus de la cité, les gigantesques places décorées de statues ouvragées et de gravures, les tissus de couleurs qui flottaient dans le vent au-dessus des rues, les marchés avec leurs innombrables étals de marchandises venues des quatre coins de Thédas... Et plus impressionnant encore que les palais : tous ces lieux de savoir, les bibliothèques, les écoles, la grande université, le cercle des mage. Elle avait passé les premières semaines dans un émerveillement constant, à se tordre le cou dans tous les sens tellement il y avait de quoi attirer son regard.

Des années plus tard, elle n'était toujours pas parvenue à s'y habituer réellement. Aussi foisonnante et cosmopolite qu'elle fut, elle était presque trop bruyante, trop agitée pour réellement en profiter. Peut-être que les grands espaces de son enfances, les montagnes et leur successions de vallées et de forêts, lui manquaient quelque peu. De même que sa mère, et sa famille du côté des Anderfels. Il y avait quelque chose qu'on ne pouvait pas retrouver dans les lettres. Mais elle restait infiniment reconnaissante de la chance qui lui avait été accordée quand elle pensait à tout le savoir accumulé entre les murs de Val Royeaux. Elle pourrait passer des années plongées dans tous les livres disponibles jusqu'à ce qu'elle arrive à court, et elle l'aurait sans doute fait si son nom ne l'avait pas forcée à d'autres obligations. Elle ne le reprochait cependant pas à son père ; ce dernier n'était lui-même pas le plus friand de toutes les simagrées de la noblesse, et s'il s'arrangeait pour que son héritière s'y expose ici et là, il était partisan du strict nécessaire. Seulement, dans cette cité, rien que le strict nécessaire demandait beaucoup.

Les apparences, voilà ce qu'il fallait maintenir en permanence. Et si Lucie avait tant de mal à le comprendre, c'était parce qu'elle n'avait guère la notion de dissimulation : elle était qui elle était, et l'affichait pleinement. Ce qui n'était pas la norme dans le nouveau cercle où elle n'avait parfois pas d'autre choix que d'évoluer. Comme ce bal, par exemple. C'était un miracle qu'elle ait réussi à en vivre si peu depuis on arrivée, mais jusqu'ici elle avait toujours pu prétendre à d'autres aspirations, comme la nécessité de s'adapter aux nouvelles écoles, ce genre de chose. Mais elle était une adulte maintenant, elle l'était depuis quelques années déjà, et il y avait des obligations qu'une fille de noble, même d'un noble relativement mineur, ne pouvait sauter.

Cette soirée en était un bon exemple : un bal donné en l'honneur d'elle ne savait exactement qu'elle partisan des arts et des lettres, où il était bon de s'afficher si on avait le moindre lien avec l'université ou le monde de l'art. C'était aussi le premier événement de ce genre où son père avait décidé de déléguer pour qu'elle y représente en personne la famille, et si elle avait eu la moindre once de duplicité en elle, elle aurait sans doute pensé que cela arrangeait bien son paternel. Elle était loin d'y penser, cependant, et espérait surtout qu'elle n'allait pas commettre d'impair trop regrettable. Elle n'avait même pas emmené Henry avec elle, mais elle avait promis de lui ramener des petits-fours. En parlant de ça, elle se saisit d'une poignée d’amuse-gueules qu'un domestique transportait sur un plateau à portée. Elle souleva son masque pour en enfourner deux d'un coup, mâchant bruyamment tandis qu'elle observait la foule. Elle était plutôt fière de son masque, pour la simple raison qu'elle l'avait confectionné elle-même plutôt que de se contenter du type de masque à la mode en ce moment. Elle n'était pas très manuelle, elle le reconnaissait volontiers, mais on ne pouvait nier son enthousiasme : on reconnaissait quand même un oiseau, derrière la colle qui avait séché en dégoulinant sur les côtés, les fausses plumes un peu ébouriffées et les paillettes dispersées au petit bonheur (Lucie n'était pas du genre à résister à une bonne dose de paillettes quand elle en avait l'occasion). Pour le reste, elle portait une robe d'un rouge vif, décorée ici et là de bandes jaunes éclatantes, sans oublier les manches bouffantes.

Enfin, elle repéra la personne qu'elle cherchait du regard depuis tout à l'heure, du moins en était-elle à peu près sûre. Elle se dirigea droit vers elle, contente de se dire qu'elle n'aurait pas à traverser le bal toute seule. Après tout, son père s'était arrangé pour que Lucie puisse compter sur la présence d'une connaissance de la famille, la femme d'un homme qui évoluait dans les mêmes cercles que lui. Lucie avait déjà eu l'opportunité de la croiser ici et là, et elle s'était aussitôt prise d'amitié pour elle, avec la franchise qui était la sienne, sans faire le moindre cas de leurs différences.

« Youhou ! » fit-elle joyeusement, agitant une main dans les airs, bousculant plusieurs invités dans la foulée (s'excusant à chaque fois sans pour autant arrêter sa marche décidée) jusqu'à ce qu'elle rejoigne l'autre femme. « Chalut Flore ! » Elle avala presque tout rond la dernière bouchée de canapé, avant de reprendre : « Je veux dire, salut ! Y a du monde, hein ? Heu, c'est pourquoi déjà? » Pour quelqu'un qui avait normalement une mémoire parfaite, il y avait tout simplement des choses auxquelles elle ne faisait simplement pas attention... Elle ajouta un grand sourie, totalement inconsciente de l'effet qu'elle pouvait avoir sur la solennité du bal.
Lucie Delagarde

Lucie Delagarde

Rebellions are built on hope
▲ MESSAGES : 23
▲ OCCUPATION : érudite
▲ COMPÉTENCES ET ARMES : érudite sur un grand nombre de domaines, mémoire photogaphique, parle de nombreuses langues, compétences de base en survie et à l'épée

http://plumederenard.hautetfort.com/

Revenir en haut Aller en bas

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut

- Sujets similaires