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Dim 29 Oct - 9:46

Mora
&
Séraphine
La charrette d'infamie
Halètements obscènes, pestilence de fond de caniveaux, irritants cahots – aiguillons qui percent les chairs là où l’horreur a planté vos chaînes. Orbites vides, tu contemples la lente déliquescence de tes compagnons. Violeur, voleur, meurtrier, parricide, horde impie, faces noires, mains rouges, allant sans nom, sans visage, sans rien sur les chemins dévoyés de la Garde. Par les interstices des claies, on tente d’échapper à la nuit qui sombre. Où sont les paysages ? Perdus, effacés, raptés. Néant cinglant le vice du sacrifice, molestant votre destin voilé.

Certains pleurent déjà leur liberté oubliée. Tu préfères compter.

Echardes d’obscurité. Chocs. Des lois que tu t’imposes, tu implores le dieu égoïste. Qu’il ne te laisse pas t’enliser, qu’il fasse barrage aux pierres, aux coups, et aux lames amères. Trois entailles supplémentaires et le soleil se lèvera. Cinq de plus, on te crachera dans la glauque iridescence de l’aube.  Car c’est ainsi que l’on la nomme ? Quand tout est gâché, que tout est saccagé, et que l’on respire pourtant, mais qu’on a tout perdu, que votre vie brûle, que les innocents s’entretuent mais que les coupables agonisent dans un coin du jour qui se lève.

L’aurore.

Les gonds grincent. Les portes s’ouvrent. Tu ne distingues rien que le fog, jaune, gras et lent. Une plainte lointaine, un appel de souffrance, des râles sourds qui montent des encoignures, des insultes aigrelettes qui vous éclaboussent de leur spectrale lâcheté, et bientôt le tintement du joug des forçats que l’on traîne dans la boue.

Le sol crève sous ton pied gauche et nu. Le limon bleuâtre fuse comme un jet de pus.  Il y a là un soleil sanglant, sinistre, posé sur la ligne d’encre d’un sordide marais, un corbeau volant sur la bavure rouge de l’horizon. Une poignée de maisons misérables se serrent autour d’une chapelle – en guise de défense face à l’hostilité naturelle. Et trônant dans cette désolation, ta génitrice.

Il y a là des discussions interminables que tu n’entends pas, l’odeur écœurante des corps sales, les silhouettes boueuses des péquenauds du cru face auxquelles la sylphide semble plus tangible. Tu la perçois mieux que dans l’obscurité crasse de ta geôle. Cornes d’ébènes, drapée de nuit et d’étrangeté, elle semble prêter une esgourde attentive aux griefs de la paysannerie. Tu n’échappes pas aux regards torves, aux dents cariées, aux gestes obscènes que la populace adresse à la chienlit. Quel autre choix que d’attendre, clouée que tu es à la longue lige des damnés ?

Deux gardes libèrent tes chevilles rongées de fer et de rouille et te trainent, airain aux poings, vers un réduit miséreux refoulant la pisse et le rat. On t’ordonne de t’équiper au mieux. Il faut encore racler le limon de tes membres endoloris, revêtir les hardes de cuir bouilli, les chausses trop grandes. D’armes, nulle trace.  Peut-être que ta mort sera aussi rapide que miséricordieuse ?

On vous aligne au centre du hameau. Bientôt, la sorcière prendra parole et vous tancera de sa sentence.


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Lun 13 Nov - 0:21


un baptême enténébréoindre ton front de sang
***

Relationnel miasmatique, les oeillades torves en amont de lippes obliques, la charrette qui tire les hères en direction de leur purgatoire recèle d'aliénés disparates. Il y a ceux qui se vautrent tels de gentils gorets dans leur flasque mutisme, celui qui depuis leur départ des geôles féreldiennes, susurrent vœux et patenôtres à ces entités que le commun révère, ou encore, ceux qui consentent bon gré mal gré à ce fatum finalement pas plus hideux qu'un autre. De la meute indocile ne se lèvent que deux truffes féminines, et la naine à laquelle il manque phalanges et bribe d'esgourde a la gracieuseté ostensible d'une wyverne alouvie. La Chiarde, pourtant, interloque bien plus. Imperceptibles mouvances qui la marquent, dans le groupuscule de bretteurs des géhennes, tous savent de quoi on l'incrimine. Quelques-uns en témoignent, d'autres se le sont fait narrer d'une gueule pantoise. Et pis encore que l'acte écervelé, ils se questionnent sur sa présence parmi eux. Drôlesse que voici, l'intuition leur somme ironiquement que de tous les traînes-misère dont ils s'encombrent, c'est à elle qu'il ne faut point exhiber le rachis.

Les masures s'harmonisent au décors environnant, détour fortuit que la compagnie s'impose avant d'atteindre le but de sa longue pérégrination – car si certains ont été glanés en chemin, les galvaudés, eux, se traînent depuis les Anderfels. L'éreintement cercle les faciès, et si paroles ne fusent, tous ont hâte d'atteindre le comté d'Amaranthine et de profiter du Fort Bastel. Cependant la volition demeure, brûlante sous les braises pusillanimes de leur motivation qui ne demande qu'à les embraser tout entier, et quel Garde digne de ce nom se détournerait de la psaume des engeances ? Car ce sont de leurs sempiternels antagonistes dont on fait doléance, le phonème guttural du glaiseux en chef violant les tympans d'une Divinis emprunte d'un quant-à-soi algide. La Goule entend mais ne dit. Les cornes se meuvent en accortise tandis qu'aux entours l'on épie les premiers et hypothétiques symptômes de corruption. L'affaire mérite que l'on s'y attarde, le portrait des événements n'est que trop vraisemblable pour que ces cul-terreux cancanent des affabulations. L'on échange prestement entre les aînés, puis l'on estime qu'un baptême du feu pourrait être opportun et même cathartique pour la bleusaille – quitte à se soulager d'une ou deux recrues inaptes à affronter les écueils de leur quotidien, autant que cela se fasse maintenant. L'on retire les chaînes, la chasse sonne pour les limiers en herbe. On les équipe ensuite du minimum de cuirasse à disposition, et les dispose en rang d'oignons sur la misérable place du hameau sans se soucier de contingents maux.

Avant la Goule, badaude celui qui s'apparente le plus à son Second. Le flavescent de son crin et sa prestance de sigisbée jurent avec son statut, ce genre de quidam, on le croise à recevoir les dithyrambes des dignitaires au Palais d'Hiver plus qu'à écumer la bourbe des nations. Néanmoins, il semble bien ancré dans son rang, le plastron fièrement en avant tandis que le mythique griffon l'ornemente. Il vérifie que tout est en ordre et ne recule qu'à la venue de la ténébreuse mage, qui entonne avec une haute puissance vocale et discursive.

« Haut les cœurs scélérats, votre Démiurge dresse les prémices de votre calvaire. Que cette tribulation vous soit triomphante, que vous goûtiez à l'ichor des cauchemardesques ribaudes que dégueulent les Tréfonds. Celui-ci sera votre cigüe, pour aujourd'hui et demain peut-être, si tant est qu'il ne vous calcine pas les artères à la première goutte. » Quelques ricanements s'élèvent chez les gradés, victimes d'un ressac de réminiscences quant à leur dépucelage en la matière. La Sorcière s'immobilise au centre de la ligne formée et décoche un regard à la soldatesque. « Il y a une forte suspicion que des engeances rôdaillent dans les environs, si tel est le cas, nous devons les éliminer avant qu'elles ne gangrènent. Pour ce faire, vous sera octroyé une arme à chacun. Voici les quelques règles à respecter pour votre propre sûreté : si vous tentez de fuir, vous mourrez. Si vous essayez de meurtrir l'un de vos supérieurs ou acolytes, vous mourrez. Si vous vous faites blesser par une engeance, nous n'aurons potentiellement pas le temps de vous tracter jusqu'à Fort Bastel, alors... vous mourrez. » Le céladon rétinien s'arrête sur Séraphine et l'incrimine à l'avance d'un forfait qu'il lui faudra laisser fantasme. La putain n'a pas droit à l'erreur. « Vous serez tous escortés d'au moins l'un d'entre nous, suivez les instructions de votre mentor, apprenez à nouer confiance avec vos futurs frères et sœurs. Votre nouvelle vie commence, soyez dignes de la besogne dont s'acquitte la Garde des Ombres, et un jour, vous aussi serez en mesure d'effaroucher la bleusaille. »

Le blondin aux allures de chevalier repasse dans les rangs, offrant un objet coupant ou contondant à chacune des recrues. Un mot est glavioté au passage, un seul, jusqu'à ce qu'il arrive à hauteur de l'apsara à laquelle il tend son bien. « Ton mabari reste dans la charrette, sa vie serait mise en danger s'il ingurgitait du sang d'engeance. » L'intonation est impérieuse mais cordiale, l'adonis ne sue d'aucune âcreté, quand bien même a t-il assisté à la démence de la gamine à Dénérim. Il apparaît même bizarrement empathique et s'attarde à la contempler, avant de désigner Divinis d'un signe du chef, lui faisant ainsi comprendre que son fatum reste scellé à son chaperon du jour.

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Dim 3 Déc - 3:10

Mora
&
Séraphine
La charrette d'infamie
Jusqu’à ce jour, tu t’étais souvent demandé pourquoi l’avenir ne s’écrivait toujours qu’au singulier. Enfant encore, le joug du destin semblait trop léger, les infinis possibles, les étoiles à portée de baiser. Il suffisait de croire pour que les miracles se réalisent, de sauter sur les pierres du chemin  pour que l’oblivion couvre de nuit les scories, et que l’aube soit sauvée.

Tu aurais dû savoir que la plus grande chute est celle que l’on fait du haut de son innocence. Quand les prières ne suffisent plus à refermer les chairs sectionnées, quand le sang ami se répand sur le pavé et que l’on hurle aux alentours le massacre et la trahison, quand les flammes des cierges dévots calcinent les idoles anciennes et que de tous nos vœux pieux, ne demeure que l’amarante.

Les années t'ont flouée. Toute leur eau, même si les mers se rassemblent ne lavera pas complètement ta main. Tu habilleras ses océans de pourpre, son vert du rouge car c’est là l’apanage de l’enfant qui rompt les entrailles maternelles.  Est-ce que le sacré résiste au matricide ? Se cache-t-il dans la boue et la merde de rat ? Dans l’esgourde ravagée de la naine qui enfonce son épaule dans tes côtes ? Dans la scintillante crinière du bellâtre qui te force la mort entre les pattes ?

Qu’il ne vienne pas te parler de victoire. Tout est jouet. La gloire est rancie. La grâce corrompue. Il ne subsiste aucune rédemption, aucune possibilité de retour. Qu’elle se mire dans l’aigue morte de tes espoirs violés, qu’elle se repaisse des voies déjà poussiéreuses que ton pied ne foulera jamais. Tu seras son gladiateur. Serf dont la chair n’est pas de celle qui repousse. Une voie tendue par la rectitude de la ruine. Doigts écharnés par la hampe de bois, le froid qui gèle les hiers et les demains en d’éternels aujourd’hui.

Tu sens la mire inquisitrice du blondin gratter ton visage, s'infiltrer sous l'ecchymose. Cherche-t-il encore trace d’une réponse ou bien observe-t-il la rage bouclée à tes nerfs ? Contemple-t-il la face nouvelle de l’esclavage ? Vient-il voir le masque bravache se fissurer ? «Nourris le corbeau, il te crèvera les yeux. Ce que tu ne tues pas maintenant, te trahiras demain. » gouaille la fille de la pierre contre ton sein. L’haleine chargée de vérité te choppe aux tripes. Elle ricane de son mot d’esprit et tu peines à résister à l’envie de graver des béances dans ses cordes vocales. Peut-être aimerait-elle ces petites séances de travaux pratiques ? Pourtant, ta main est immobile et tu acquiesces placidement aux dires du second. « Merci », glisses-tu simplement avant de t’éloigner.

Tu es seule quand tu t’avances vers la Dame de Jade. Autour de toi, le monde semble se taire et se parer du poids de l’inquisition. Tu t’arrêtes à quelque distance, ton arme au repos. Ce n’est pas l’heure. Point de salut, guère de politesse, tu te glisses silencieusement dans l’ombre de ton ascendante.  Votre progression est lente, la vue monotone, ce qui ne fait qu’augmenter le malaise qui fouraille tes tripes.  Tu arrêtes tes pas au beau milieu de la vase épaisse, vaguement contrariée.

« Pourquoi ? »

La question a jailli de ton gosier avant que tu n’aies pu la réprimer. Elle bouillonnait depuis trop longtemps celle-ci. La bougresse était-elle prévenue de votre parentèle ? Dans le cas contraire, pourquoi l’épargner ? La charrette dégueulait de coupe-jarrets, il devait exister d’autres gibets, d’autres prisons ? Devant l’incompréhension manifeste de la sorcière, tu reprends :

« Pourquoi vous embarrassez-vous de moi ? Les autres avaient-ils trop peur que je ne tente de les égorger derrière les roseaux ? Ils chient dans leur chausse à l'idée que je les accompagne ? Ou bien cachee-vous d'autres projets ? »








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Dim 3 Déc - 17:42


un baptême enténébréoindre ton front de sang
***

La gouaille se muselle au revers des lippes carminées, qui ne se meuvent que pour converser des ultimes détails en compagnie de ses homologues. Les commissures demeurent autrement statiques, quand bien même la risette carnassière se meure de naître et d'aveugler la Clabaude d'ailleurs privée de sa bâtarde. Le cabot nidoreux garde son carcan lié à la charrette, sous la surveillance d'une sentinelle qui garde le calot sur leurs affaires. En plus de l'égard quant à la névrose dont l'affecterait l'ichor d'engeance sans qu'ils ne puissent traiter convenablement cela, la sommation vient de Divinis, trop convaincue que le mabari se pourlèche les babines de grailler dans sa carne tendre. Elle le voit dans ses yeux congestionnés d'inintelligence et ce rideau charnel qui se lève et dévoile ses ratiches affilées à chaque fois qu'elles se situent à proximité. Pas de clebs pour lui croquer le séant donc, elle aura déjà suffisamment à faire avec sa maîtresse.
La bougresse est orientée par le Sigisbée, direction les talons de l'aranéide qui, à sa vision, acquiesce aux propos de son camarade avant de le quitter. Elle se déplace et s'engouffre dans le cloaque sylvestre sans s'ombrager de la bourbe qui se conglomère à ses bottes et vêtements – point de place pour la préciosité dans leur sempiternelle coercition. La meute aux aguets d'antagonisme gâté se répand aux quatre coins cardinaux, persuadée que si menace il y a effectivement, cette dernière n'est en rien considérable. Tout d'anthracite et de mutisme drapée, la tévintide progresse, humant presque à l'instar d'un élégant limier pour tenter de localiser les créatures, qu'ils puissent les occire et reprendre promptement leur chemin. Volition vive à l'esprit qui se fait soudainement incommoder par l'accès rétif de la gamine, stoppée dans son échine et qui se fend de son interrogation existentielle. A quelques coudées d'elle, l'hydre se retourne et arque un sourcil curieux et dédaignant. Son profil pivote au gré de la litanie, jusqu'à ce qu'elle soit entièrement face à la chétive recrue.

Cette fois, ses lèvres charnues et goguenardes s'évasent en un sourire manifeste. De son goitre point un rire qui croît en intensité, sa paume allant même soutenir sa panse tandis qu'elle se gondole. « Quelle délectable ironie. » Son incartade se lénifie enfin, la laissant subitement aussi algide que l'aquilon. « Ne serait-ce pas exactement la même question qui a ballé à ma bouche dans les geôles de Dénérim ? Celle que tu as laissé moribonde en m'implorant presque de passer le chanvre à ton cou ? » Elle toise l'Impudente, la contemple juchée sur le socle sur lequel elle l'avait elle-même mise lors de son interrogatoire dans sa cellule. Les phalanges pianotent sur la cime du bâton enchanté, pendant que la paluche libre valse à la rythmique des paroles. « Entendons-nous bien mon enfant, je ne m'embarrasse de rien du tout. Tu n'es qu'une opportunité dûment saisie, la Garde passe avant ma satisfaction personnelle – dans le cas contraire, je t'aurais sacrifiée à quelque rituel impie. Au mieux, tu survis en poursuivant mon œuvre et celle de centaines de Gardes des Ombres avant toi, au pire, tu en meurs. Il y a plus atroce destinée, finalement, que de participer à une cause qui en dépasse beaucoup. »

Mais la savoir se traîner dans la macule de ses empreintes la conquiert malgré tout, ce qu'elle tait sous sa morgue givrée. Cependant, voilà qu'un frémissement lui liche l'épine dorsale, et que la superbe se désenchante. Les prunelles quêtent frénétiquement – un péril rôde. D'un geste, Mora enjoint la féreldienne de faire silence, tout en amoindrissant la distance qui les sépare. Tout à coup, son arme enfante une rutilance de jade, son bras se dresse et une égide hyaline les love sous sa protection. Une trinité de carreaux ricochent brutalement sur le bouclier éthérique, qui sans celui-ci, auraient fauché les dryades. Le sort s'écroule en des corpuscules enchantés, et des broussailles épineuses, bondissent de putrides créatures qui feulent et mollardent. Simulacres des spectres cauchemardesques que l'on narre aux bambins pour les effaroucher, les monstres sont réels et incarnent toute la laideur de ce macrocosme. Gangrenées par le vice même de l'humanité, les engeances brandissent leurs effroyables estocs, parées à en découdre.

« Dis bonjour Séraphine. » Un instant où le temps se suspend. Puis, la mage condense son énergie, de la terre nourricière se mettent à sourdre des ronces telles des vipères sur le crâne d'une gorgone. Elles vermiculent jusqu'à deux des ennemis qu'elles emprisonnent et essaient de digérer dans le sol. La troisième et dernière engeance de cette prime rencontre sautille de stupeur et d'exaspération, irascible, plus courte sur pattes que ses congénères, elle s'élance avec fureur. « Ce Genlock est à toi. »

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Sam 9 Déc - 16:08

Mora
&
Séraphine
La charrette d'infamie
Au matin de ta vie, les Sœurs te longeaient de « tu ne dois pas » puis en grandissant elles y avaient ajouté les « tu dois ». Règles et interdictions, autant de rituels rythmant tes jours. Désormais instrument en des mains étrangères, tu seras gouvernée par les « tu es ».  Esclave, soldat, gladiateur, sauveur ou tout à la fois.  Engeance maudite ou bras barrant d’acier les ténèbres. Tu seras Garde des Ombres.  Aussi, le rire te larde des éclats du mépris. De cette blessure au coeur, tu détournes les yeux  et les plongent dans les crevasses qui saignent les nuages par des plaies larges et pleines.

Tout ira mieux.  

Tu fondes ton nouvel univers sur la haine. Elle te fait  promettre de ne laisser vivre aucune autre émotion que la crainte, la rage, le triomphe et  l’humiliation t’assujettissant par la même à  la suavité d’un progrès éternel vers la souffrance et l’anéantissement. Aujourd’hui tu bannis les verbes « vouloir », « souhaiter », « rêver » pour les troquer contre « pouvoir », « devoir » et « mourir ». Il faudrait qu’il soit simple de nier son humanité, de régresser dans l’abandon commode de ton cerveau reptilien. Raturer ton passé et en oublier la rature pour prolonger éternellement un présent qui n’aurait jamais de futur. Ainsi, tu es né, ainsi, tu mourras. Deux jambes pour courir. Deux poings pour se battre. Un cœur pour échouer.

Tu t’enfonces  dans la nuit de son ombre. Pas silencieux dans le paysage dévasté des pins agonisants de leurs blessures au flanc,  du poison noirâtre pompé par leurs racines. La sorcière va à saut et à gambade dans la désolation du marécage, insensible à l’insalubrité du lieu. Son pas sonne le cor de sa satisfaction. Il est alors facile de te fondre dans les grises nuées rythmées par le clapotis écœurant de ses bottes.

Quand elle s’immobilise, tu manques de la heurter. La bourrelle hume l’air, teste du bout des lippes sa sapidité limoneuse. Elle fouraille et creuse la brume d’une prunelle aiguisée. Tu t’es chevillée à la boue comme un chien marquant l’arrêt. Esgourdes ouverte, les fins cheveux de ta nuque hérissés dans l’expectative d’une rencontre fatale.

L’Ogresse déploie son bouclier contre lesquelles les flèches viennent se briser. Si tu avais le temps de la réflexion, tu remarquerais à quel point leur artisanat vicié est aussi loin que possible d’une forme de beauté. La terre se creuse déjà pour qu’en jaillissent des vignes épineuses transperçant les corps déformés.

Il n’en reste qu’un. La créature gargouille et gesticule alors que tu armes ta main tremblante. « Bonjour », souffles-tu obéissante. Les engeances n’avaient, jusqu’alors, été que de vagues croquemitaines que l’on agitait au-dessus des feux crépitants pour faire plier les garnements indomptables. Tu en étais toujours. De ceux qui partaient, bâton à la main, pour chasser les mauvais esprits de l’obscurité qui clapotait sous les lits.

Si tu ne fais rien, tu vas échouer. Encore.

Le genlock ne sait que faire. Hésite de ses petites jambes courtaudes. Fuir ou affronter la gosse franchement pâle qui le toise d’un œil un brin ahuri. C’est l’autre bougresse qui le préoccupe. Instinctivement, il sent qu’on le sert en pâture. Toutefois, on ne lui a jamais appris à réfléchir alors il charge.

Le combat qui s’engage est légèrement pathétique. Loin des charges épiques auxquelles tu t’adonnais en imagination, te voilà à mouliner de la lame pour tenir la Répugnance à l’écart. Tout ton être te hurle de ne pas entrer en contact avec l’infamie qui le frappe, de te tenir à distance de la Contagion. Peut-être penses-tu lui faire sonner la retraite, ignorante que tu es ? Par deux fois, il enfonce ta garde et manque de te trancher le râble,  et par deux fois, tu rends Grâce à la protectrice des causes désespérées. Est-ce la pestilence de son haleine ou l’oblivion régnant dans ses prunelles caves qui t’engage soudainement à accomplir ton devoir ? Tu t’étais trompée.  Il est étranger à votre monde et ton devoir a toujours été de renvoyer les cauchemars dans les ténèbres qui les chiaient. A l’orphelinat, il suffisait de hurler assez fort pour les chasser alors c’est ce que tu fais lorsque tu lui fends le crâne en deux. La lame reste figée entre la rudesse de l’os et la cervelle déliquescente. La créature s’effondre à tes pieds et tu recules précipitamment comme brûlée.

Tes mains s’écharnent sur tes braies boueuses, l’estomac révulsé. Sur tes lèvres, de la neige. Ton regard effrayé se porte sur ta mère. Il n’est plus temps de fuir. Elle a bien su deviner que tu ne te débinerais plus une fois la tâche accomplie. On ne luttait pas contre l’éducation chantriste, contre le devoir que l’on vous tatouait  au cœur et qui vous poursuivait de sa culpabilité telle une Némésis. Maintenant tu sais. C’est ici que tu passes le point de non-retour, que tu abandonnes ton ancienne vie.

De tes mains mal assurées, tu arrache L’acier  du corps meurtri et fouille rapidement le cadavre. Un poignard. Quelques sols. Les pièces souillées brillent froidement entre tes doigts. A quoi peuvent-elles leur servir ? Les collectionnent-ils comme autant de trophée ?  Tu songes au pauvre hère qui les a défendues au prix de sa vie et murmure quelques paroles votives à son attention.

Tes interrogations restent muettes tandis que tu suis les pas de ton aînée. Il n'y a plus rien à dire. Tu la hais de t’avoir craché dans la misère puis arraché au confort relatif de ta vie en te projetant sur la toile souillée de la Révélation. Pourtant, n’est-ce pas le rôle d’un parent ?

Elle te guide, tu la suis. C’est là l’ordre des choses. Il y a là-bas un gouffre de sinistre mémoire où les pécheurs se flagellent. De connaissances populaires, l’entrée en est étroite et mène vers le cœur des tréfonds. Aujourd’hui, c’est l’Enfer qui rote et la bile corrompue exsude de ce goitre empuanti.  Autour de vous, des arbres lugubres, d’aspect grotesque se dressent et vous contemplent d’en-haut comme quelques colonnes d’un temple infernal, assourdissant le bruit du tonnerre et celui du vent, ne laissant passer que quelques gouttes de pluies. Au-delà des troncs meurtris, illuminés par de brefs éclairs, s’étalent la dentition éparse d’un tumulus en ruine rongé par le lierre, pollué par une végétation surabondante et blanchâtre.

Tu n’oses observer la béance qui crève la mousse. Assez large pour laisser passer un corps en armure. Assez longue pour rendre votre entreprise complexe. Mora s’immobilise. Vous allez veiller ici, le temps de trouver  solution pour de vaincre l’entité qui provoque la corruption des créatures des environs ou de condamner l'accès. Pour lutter contre la froidure, la femme te demande un feu. Tu la tances d’un regard noir parce qu’en cette pratique tu es ignorante, et qu’elle pourrait  se servir elle-même d’un claquement de doigt. Tu t’échines silencieusement, rassemblant mousse, brindilles et bois d’une sécheresse toute relative avant de t’acharner sur le briquet à amadou. Après une demi-heure de lutte, une flamme faiblarde naît de la nuée avant de prendre plus de vigueur.

Elle en est la cause mais elle ne te taraude pas plus ton incompétence. Silencieuses, vous observez les flammèches se tordre dans la brume faisandée. Instant que tu brises d'une demande qui te surprend toi-même.

« Apprenez-moi. Je serai l’arme que vous voudrez. »

Deux mots pour abdiquer, pour plier l’échine.

« Avant la tombée du jour. Dites-moi ce que sont réellement les ennemis que vous me condamnez à chasser. Enseignez-moi la base avant le crépuscule. »



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Ven 15 Déc - 17:43


un baptême enténébréoindre ton front de sang
***

La préceptrice d'infortune couve son épigone d'une rétine critique, la Mort fait courbette et baiserait bien plus que les pieds de la morveuse. La saillir toute entière, bouffer et avilir sa quintessence pour qu'elle intègre la soldatesque des Tréfonds. Zombifiée sur les landes à jouter contre les vivants, c'est avec les desiderata de perversion et de pandémie que le genlock trépigne, misérable fantoche d'une puissance allant par-delà l'entendement. Le Mal qui coule son oeillade dans le blanc des mirettes, il lance l'offensive face à une Séraphine étonnamment précautionneuse, à l'antipode de cette vaudeville que les deux apsaras se sont offerte au marché de Dénérim. Imperméable aux geignements s'atrophiant des autres engeances que la terre meuble finir par engloutir entièrement, la sorcière nielle les mouvances du combat dans son esprit, consciente que son verbiage en terme de corruption par l'ichor a engendré son effet de méfiance. La distance ainsi instillée et scrupuleusement maintenue courbe un simulacre de sourire sur son faciès, la ramenant à ses années embryonnaires de veilleuse des ténèbres. La créature finit par se faire empaler l'encéphale, rendant son putride souffle dans un râle guttural que trop satisfaisant. Une fine nue opalescente s'échappe des naseaux de Mora qui soupire et contemple les alentours tandis que sa disciple furète sur le macchabée.

« De sa première proie, l'on se souvient surtout de sa hideur. » Récite t-elle avec une visible nonchalance. « Continuons. »

Et le tandem de se remettre en chemin. Le ressenti gâté de l'Aînée hissé à son paroxysme, elle tente de débusquer les antagonistes camouflés sans s'ombrager des arbres aux aspects baroques qui s'essaient d'accrocher ses cornes. De lestes demi-cercles de crâne lui permettent de s'infiltrer sur un sentier davantage fruit de leur hardiesse que réellement tracé, et elles avancent, à la rutilance des éclairs qui se font chantres du ciel. La clameur ainsi époumonée ne dulcifie en rien la péripétie, et le firmament chiale un peu de son eau sur les frondaisons parfois partiellement dénudées. La noirceur tire finalement sa pèlerine, contraignant les badauds à faire une halte. L'aranéide repère un galgal antédiluvien qui fera l'affaire en guise de refuge, quitte à supporter une promiscuité à laquelle ni l'une ni l'autre n'aspire. A l'abri de l'humidité et des bourrasques, au moins, mais la masure improvisée à besoin d'un âtre pour accueillir la braise salutaire. Besogne déléguée à la benjamine qui s'exécute laborieusement, vraisemblablement inaccoutumée à la survie autre que celle des bas quartiers. Aucun commentaire n'est toutefois sifflé, l'hydre se contentant de prendre place sur un rocher convexe à proximité du feu en tirant de son ceinturon une minuscule aumônière, de laquelle elle extirpe la feuille d'un quelconque végétal qu'elle glisse entre ses molaires. Elle mastique sans mot dire, happée par ses pensées jusqu'à ce que la Chiarde éructe son abdication. Bien que pantoise, la semi-sylphide la guigne d'un regard tiède ocellé de cautèle. La suspicion de rouerie, toutefois, se fait exorciser par le bon sens ; si la féreldienne avait ambitionné une félonie, elle aurait poignardé son échine tandis qu'elles se succédaient sur la route. La requête lui semble intègre et elle prend le temps d'y songer.

« La Chantrie vous enseigne bien des choses à vous autres sudistes. » Entonne la narratrice, ployant par la même opportunité une bribe d'information. L'idiome est parfois évidence, et par sudistes, Divinis implicite qu'elle n'est la pouponne ni de Férelden ni d'Orlaïs, sûrement pas non plus des Marches Libres. « Que les engeances soient les infants de bévues tévintides, supposément dépravateurs de la Cité d'Or, nous ne pouvons le corroborer avec certitude. Tout ce dont nous sommes assurés, c'est qu'Elles sont là, et qu'Elles ont fait de l'empire nain un reliquat pouacre. » Elle lustre le sol de ses yeux hyalins, comme si elle avait pu, d'ici, mirer à travers les strates jusque dans les ladres tunnels. « Elles ne vivent qu'avec deux desseins : celui d'altérer tout ce qu'elles touchent, et celui d'exhumer les Anciens Dieux. Une fois corrompu, il devient un Archidémon, qui guide alors ses armées jusqu'à la surface. » Elle regarde Séraphine. « Un Enclin. » Apocalypses ayant par plusieurs fois éventré Thédas, jusqu'à présent glorieusement éconduites par les Gardiens qu'ils constituent depuis bien longtemps. Redressant son épine dorsale, elle ressort une feuille de sa jolie bourse. « Sans doute as-tu entendu parler de la maladie qu'elles propagent, le sud de Férelden a mis un moment avant d'en panser ses forêts et bourgades suite au dernier enclin. » Elle se penche et tend la fameuse feuille à la donzelle. La sève extraite de ses nervures procure un effet tranquillisant, une simple friandise pour les méninges. « Nous l'appelons la Souillure. Elle est incurable... la plupart du temps, et transforme son porteur en Goule. Un sort que je ne souhaite à personne. Mais, crois-en ma parole, il existe bien pires créatures dans les Tréfonds... »

Ses paumes, libres de leur bâton posé contre la paroi du tumulus, s'agglutine l'une à l'autre. En leur cœur, les coutures du traumatisme le plus notable de son existence, qui ornementent également le dos de ses mains. Les cicatrices d'une crucifixion qui la hante encore aujourd'hui. « Les Hurlocks et le Genlock que tu as vus précédemment sont les formes les plus communes d'engeances, si j'ose dire. Ceux-là, bien sûr, n'étaient que de simples soldats. Mieux vaut avoir affaire à ces catégories plutôt qu'à un ogre ou un émissaire, leurs mages. Mais si tu survis, tu auras loisir de tout apprendre sur tes ennemis. Je ne peux malheureusement pas te confier tous nos secrets avant que tu aies fait ton initiation. » Le griffon brodé sur les atours de la Dame semble s'illuminer à la valse des flammes, cette dernière fait montre d'une modestie truculente et paradoxale, tandis qu'elle se met à défendre se qui constitue la fierté de son Ordre. « La Garde est la sentinelle oubliée de Thédas. Elle seule détient le savoir nécessaire pour mettre un enclin en déroute, elle seule s'échine même en époque de rémission à percer l'obscurantisme liée à cette malédiction dont même le Cantique fait mention. Sans gloriole, les Gardes vivent dans la viduité de leur passé et dans celle de l'estime populaire, puisque la vérité est que nous ne sommes trop souvent appréciés qu'en temps d'anathème. Pourtant, sans nous, cette terre courrait à sa perte. Nous sommes un idéal d'holocauste. » Un faible sourire enjolive son minois placide. « Dans la guerre, la victoire. Dans la paix, la vigilance. Dans la mort, le sacrifice. »

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